Shelby
En Angleterre, la marque AC, spécialisée dans la fabrication de voitures sportives, est contrainte de remplacer son moteur ACE, un petit moteur six-cylindres à arbre à cames en tête tout en aluminium de 2 litres de cylindrée ne dépassant pas les 100 chevaux, plus assez puissant et compétitif, par le moteur Bristol (d'origine BMW) qui équipait les BMW 328, développant 145 chevaux et bénéficiant alors d'une excellente réputation. Ce dernier était usiné avec un soin extrême selon des normes identiques à celles de l'aéronautique, en utilisant les meilleurs matériaux du marché. Plus puissant que le moteur AC, il se révélera plus adapté à la compétition automobile.
Bristol fut néanmoins contraint de suspendre la fourniture de mécanique à AC à partir de 1961. En effet, c'est à cette époque que le constructeur basé à Filton passa au tout V8, avec le modèle Bristol 407. AC tentera sans grand succès de remplacer la mécanique Bristol par un moteur Ford Zephyr. Mais hélas, ce dernier ne donnera jamais vraiment entière satisfaction, et seulement 46 modèles ainsi équipés furent fabriqués.
Pendant ce temps, Shelby ayant dans l'idée de créer une voiture sportive américaine pour concurrencer Ferrari sur les circuits se met à en quête d'un châssis qu'il pourrait modifier et préparer à sa guise afin de le rendre ultra compétitif.
Sa quête l'amènera donc chez AC. Shelby proposa au Frères Hurlocks, les propriétaires de la firme AC de placer dans leur voiture un nouveau moteur V8 que Ford venait de concevoir et qui deviendra plus tard le fameux 289 ci (4,7 litres).
La AC Cobra 260 voit le jour en 1962. Cette dernière est survitaminée, diablement puissante et bénéficie d'un rapport poids/puissance très élevé. La légende de la Cobra est née, et la Shelby Cobra Daytona Coupé est de taille à battre les Ferrari 250 GTO en course. .
Les Shelby GT 350 et GT 500
Un an après le lancement de la Ford Mustang, née en 1964 et qui rencontre un énorme succès auprès de la jeune génération issue du Baby-Boom d'après-guerre, Ford souhaite donner un prolongement plus sportif à un modèle de nature assez paisible, cherchant en effet à contrer Chevrolet et Plymouth dans le championnat américain SCCA (Sports Car Club of America), où la Mustang de série, même la mieux lotie en options (et elles n'en manquent pas), n'est pas de taille face à Chevrolet avec sa Corvette et surtout, sa Camaro ainsi que Plymouth avec sa fameuse Hemi Cuda.
Le designer automobile Ford de l'époque Lee Iacocca (le père du dessin final de la Ford Mustang), charge l'ancien pilote de course émérite Carroll Shelby, remarqué par la direction de Ford pour ses prouesses avec la fameuse AC Bristol devenue AC Cobra par la greffe du V8 Ford, de faire des Mustang plus sauvages en vue d’une production en série restreinte pour l’homologation dès la saison 1965, en classe B pour aller remporter le championnat américain de ce qui s'appellera par la suite le championnat NASCAR.
La transformation du coupé Mustang Fastback en voiture de hautes performances se fera dans les ateliers de Carroll Shelby à Venice, en Californie. Si la voiture est aisément reconnaissable à sa livrée blanche barrée de bandes bleues et à son capot en polyester doté d'une prise d'air, les principales différences qui la distinguent des Mustang de série sont dissimulées au regard.
Pour parvenir à ce résultat, Carroll Shelby a procédé à de nombreuses transformations : le V8 de 289 ci (4,7 litres) y est affûté grâce notamment à des collecteurs spécifiques, avec différentiel à glissement limité, vilebrequin spécial, taux de compression porté à 11, carburateur Holley quadruple corps, admission par pipe spéciale en aluminium, échappements spécifiques.
Deux couvre-culbuteurs ailetés en aluminium et frappés du cobra (devenu l'emblème de la marque) complètent l'ensemble accolé à une boîte de vitesses manuelle Borg-Warner à quatre rapports de type T10 et un carter d’huile avec une contenance revue à la hausse.
Pour parer à ce surcroît de vitamines, les suspensions sont renforcées et des freins à disques montés à l'avant. Ce traitement permet de passer la puissance à 306 chevaux à 6 000 tr/min contre 271 chevaux à l'origine.
Baptisée Shelby GT 350, la voiture développe un couple monstrueux de 45,5 mkg à 4 200 tr/min et atteint plus de 200 km/h.
Les transformations effectuées sur la Mustang de base par Shelby dépasseront largement les prévisions. Le succès aura comme conséquence la diffusion de plus de 500 exemplaires en 1965 alors que la construction de cent voitures suffisait à l’homologation. Cette réussite sera encore amplifiée l’année suivante.
En 1967, la carrosserie est sensiblement retouchée : le capot est allongé et surmonté d’une volumineuse entrée d’air, la face avant reçoit des projecteurs longue portée, alors que la poupe se prolonge par un becquet.
Contrairement aux premières GT 350, la direction et les freins reçoivent un dispositif d’assistance. C’est cette année-là que la GT 350 se voit adjoindre une grande sœur, la désormais mythique GT 500.
Shelby relance la voiture la plus puissante du monde
Construite en 1967, la Shelby Super Snake sort en édition anniversaire fabriquée à 500 exemplaires
La Shelby Super Snake fête son jubilé en 2017, la même année que Fiat célèbre les 60 ans de sa toute petite 500. Pur hasard du calendrier, car les deux voitures ne roulent pas exactement dans la même catégorie.
Chaque voiture Shelby est une légende écrite par celui qui lui a donné son nom. A l’origine, Carroll Shelby est pilote de course. Texan pur et dur, mais affligé d’une faiblesse cardiaque qui l’oblige à se retirer des circuits, il se reconvertit dans la préparation d’automobiles. Comprenez que dans son garage de Las Vegas, le mécano fait comme le docteur Frankenstein: il crée des monstres de puissance à partir de pièces piquées à droite et à gauche chez divers constructeurs. On est dans les années 1960. L’essence ne coûte rien.
Carroll Shelby imagine alors un bolide capable d’aller plus vite qu’une Ferrari. A partir d’un châssis de la marque anglaise AC et d’un moteur américain Ford il fabrique la Cobra 427, roadster qui deviendra mythique avec sa carrosserie bleue traversée par une bande blanche. La petite sportive qui monte à 266 kilomètres-heures ne sera produite qu’à 343 exemplaires, entre 1965 et 1967. Les modèles d’époque peuvent facilement franchir le cap du million de francs.
Modèle unique
En 1966, le serpent repasse à l’attaque. Carroll Shelby, qui a développé pour Ford deux Mustang surgonflées, veut créer la voiture la plus puissante du monde. Il pousse les blocs-moteurs V8 à 800 chevaux. La voiture monte à 274 kilomètres-heures.
Shelby qui file la métaphore reptilienne la baptise Super Snake. Son unique exemplaire encore en circulation sera vendu aux enchères en 2015 pour 5,1 millions de dollars..
La Shelby Super Snake de 1966. Le seul exemplaire existant a été vendu 5,1 millions de dollars en 2015. (DR)
Pas tout à fait. En 2007, Ford relance le bolide sur la base de sa Mustang GT500. Cinq ans plus tard, Carroll Shelby meurt dans l’attente d’une énième transplantation du cœur. En 2017, Shelby America fête donc les 50 ans de sa muscle car avec une édition jubilé tirée à 500 exemplaires. La grosse bagnole est disponible en deux versions: l’entrée de gamme à 675 chevaux et la version survitaminée à 750 chevaux. Niveau design, le bolide affiche un profil de course moins teigneux que la Mustang qui lui a servi de modèle. A l’intérieur, pas de chichi numérique ni d’écran tactile, mais juste deux sièges baquets pour coller au bitume.
Shelby Super Snake 2019